LE COURAGE AUJOURD’HUI, C’EST DE SOUTENIR FRANCOIS HOLLANDE !
« Mais pourquoi soutiens-tu toujours ce président et ce gouvernement qui ne mettent aucunement en œuvre les promesses de la campagne présidentielle et décide des réformes conformes aux intérêts du seul patronat? »
« Mais comment pouvez-vous encore faire confiance à ce pouvoir qui accable d’impôts et de charges les classes moyennes et les entreprises et enfonce le pays dans la crise faute de réduire les dépenses publiques et d’adopter les réformes nécessaires ?
Me voilà ainsi depuis des mois confronté, assailli, pris en tenaille par ces deux critiques types, diamétralement opposées, et émanant, d’un côté des militants de l’autoproclamée « gauche de la gauche » et de l’autre de cadres et entrepreneurs convaincus de posséder le monopole de la compétence économique et donc la légitimité à dire le vrai.
Dans le contexte difficile d’un pays frappé depuis 2008 par la crise mondiale, avec chômage record et précarité grandissante, croissance atone et moral en berne, les discours négatifs, pessimistes, et pour tout dire dépressifs, ont évidemment toutes les chances d’être mieux entendus par l’homme de la rue que les rares appels à l’optimisme.
Et ce d’autant plus que la presse dans son ensemble, gauche et droite confondue, qui, de toutes façons, comme chacun le sait, ne s’intéresse jamais aux trains qui arrivent à l’heure, en rajoute dans le « Hollande bashing » .
La presse de droite car elle souhaite l’échec de la gauche qu’elle juge illégitime.
La presse de gauche car elle ne peut, habituée à se considérer comme un contre-pouvoir, se résoudre à prendre le risque de l’impopularité (audience oblige) en soutenant trop ouvertement le pouvoir en place (et ses inconvénients).
Ajoutez à cela l’hystérisation de la vie politique que le précédent président a réussi à inoculer définitivement à l’espace public et le défoulement de tout un chacun sur les réseaux sociaux, lieu de l’expression immédiate, non contrôlée, non maîtrisée, où l’excès le dispute à l’odieux, et vous aurez à peu près résumées les conditions dans lesquelles ce président et son gouvernement doivent assumer les responsabilités de conduire un pays en crise.
Il en résulte le curieux résultat d’un pouvoir disposant de la présidence, de la majorité des deux chambres et de la grande majorité des collectivités locales et ne bénéficiant d’aucun véritable soutien politique dans les médias, ce qui constitue une grande première !
Heureusement pour lui, il dispose cependant – et c’est finalement l’essentiel - de la stabilité institutionnelle de la Vème république qui lui assure la durée, cette durée si nécessaire à la réussite de toute politique, quelle qu’elle soit.
Pour autant qu’il garde son sang froid au milieu du tumulte, ce pouvoir garde donc toutes ses chances, n’en déplaise à une droite revancharde qui rêve d’une crise politique qui mettrait fin à ce qu’elle considère toujours comme une usurpation.
De la part d’une force politique qui est à l’évidence responsable de l’essentiel du marasme dans lequel nous sommes (déficits record, endettement explosé, désindustrialisation massive…) on pourrait espérer un peu plus de retenue…
Reste qu’il convient de répondre aux amis et connaissances qui expriment, véhiculent, reprennent les deux types d’arguments évoqués au début de ce propos.
Ne reflétant que mon propre avis et n’engageant personne d’autre, je leur répondrais en substance ceci :
A mes camarades de gauche et d’extrême gauche, je ferais remarquer que s’ils voulaient bien cesser quelques instants la polémique politicienne, ils reconnaîtraient sincèrement que la plupart des « trahisons » dont ils accablent la gauche au pouvoir, ne faisaient pas partie des propositions de François Hollande et que pour l’essentiel ils l’accusent… de ne pas appliquer le programme du front de gauche !
Je leur dirais aussi que s’ils voulaient bien examiner objectivement les décisions de ce pouvoir depuis mai 2012, ils ne pourraient guère porter un jugement plus négatif que sur les réalisations du gouvernement Jospin de 1997 à 2002, période durant laquelle les communistes et le Sieur Mélenchon en personne siégeaient au gouvernement !
Je les exhorterais enfin à abandonner au plus vite, tant qu’il encore temps, la désastreuse « ligne Mélenchon » qui mène le parti communiste au suicide et la gauche toute entière à la défaite.
Car de deux choses l’une : soit on se bat pour obtenir un vrai progrès, tangible, fut-il inférieur à ses rêves, soit on se bat sans espoir de réussite, au mieux pour l’honneur et les principes (respectable mais pas admirable pour moi), au pire pour libérer ses aigreurs et frustrations, se défouler ou/et satisfaire son ego personnel …
Dans le premier cas, la « gauche de la gauche » prend conscience qu’elle n’a absolument aucune chance de dépasser électoralement le PS et donc de devenir chef de file de la gauche, ni même d’obtenir un rapport de force électoral ou social lui permettant de peser (on a vu les maigres résultats électoraux, la faiblesse de la mobilisation sociale, l’isolement croissant des syndicats les plus radicaux).
C’est alors un choix honorable de rejoindre à la première occasion la majorité, pour continuer à exister d’abord, pour influer ensuite, apporter des avancées sociales, comme en 1936, comme en 1945, en 1981 ou 1997, pour appuyer, enfin, ceux qui, au sein ou dans la mouvance du PS, militent pour une politique de croissance au service de l’emploi, d’une réorientation de l’Europe et une politique économique plus volontariste et interventionniste.
Dans le cas contraire, la ligne gauchiste mènera cette « gauche » à l’isolement et à une disparition programmée de ce qui restait de la grande et glorieuse épopée communiste, non sans avoir auparavant puissamment contribué (en mettant systématiquement l’accent sur les insuffisances et les ratés et jamais sur les progrès et les acquis – et ils sont loin d’être négligeables -) à alimenter et développer le désespoir social, lequel, loin de conduire à la contestation sociale et au vote pour la gauche « radicale » , se traduira par un abstentionnisme massif et un vote pour l’extrême droite.
A mes connaissances « raisonnables », qui ne jurent que par les bienfaits de la libre concurrence et l’efficience des marchés, vilipendent la politique fiscale de ce gouvernement et pestent contre les dépenses publiques, je demanderais d’examiner calmement la situation réelle du pays.
D’abord, le fantasme d’un niveau de dépenses publiques insoutenable ne résiste pas à l’analyse. Dans les prélèvements obligatoires en France, la moitié sont des transferts qui retombent sous forme de prestations (assurance maladie, retraites, allocations familiales, indemnités chômage, etc.) dans le circuit économique. Ces dépenses publiques (souvent non comptabilisées comme telles dans de nombreux pays) ne financent donc pas une administration pléthorique mais contribuent à amortir le choc des crises et contribuent au soutien de la demande
Cela ne veut pas dire qu’il ne faille pas, surtout en temps de crise, réaliser des économies là où c’est possible. Et justement, ce gouvernement (contre l’avis c’est vrai de nombre de ses électeurs) est en train de réaliser un freinage sans précédent de l’évolution des dépenses publiques, que les précédents gouvernements n’ont jamais osé !
Pour faire face au déficit abyssal légué par le président sortant (et sorti), il est inévitable de jouer sur les dépenses mais aussi sur les recettes.
Rappelons que l’origine de ces déficits publics est pour les trois quarts au moins, non l’effet de la crise mais le résultat d’une politique systématique menée durant dix ans, d’allègement fiscal en général en faveur des plus riches !
Reste que quelle qu’en soit la ou les causes, il appartient à un gouvernement responsable de faire face à ces déficits et à y remédier.
Il ne me semble donc pas choquant qu’un effort soit demandé à chacun, oui à chacun, pourvu qu’il soit justement réparti. Et sauf quelques ratés inévitables (seuls ceux qui ne connaissent rien peuvent croire que la chose soit facile) j’attends qu’on me démontre que l’on n’a pas respecté cette exigence.
Les classes les plus aisées ont été rudement mises à contribution? Quoi de plus normal, elles qui ont tant profité ces dernières décennies ! Elles survivront !
Les classes moyennes supérieures sont soumises à un effort substantiel, difficile, mais elles peuvent s’y astreindre sans s’appauvrir.
Les classes moyennes inférieures sont également touchées, c’est vrai, et c’est difficile dans le contexte actuel, mais soyons raisonnable, cela (impôt sur le revenu, TVA, cotisations retraites…) ne représente au pire dans la plupart des cas que quelques dizaines d’euros.
Et même les classes les plus modestes sont touchées, surtout par la stagnation des bas salaires et la hausse de la TVA !
Comment appelle-t-on un gouvernement qui met l’intérêt national au dessus de ses propres intérêts électoraux ?
Moi, j’appelle ça un gouvernement courageux !
Tout cela est difficile. Mais cela ne met personne sur la paille.
La France, soumise à une rude discipline souffre mais préserve son modèle social et notamment ses services publics.
L’intérêt national est en jeu. Est-ce indécent que chacun fasse un effort ?
L’indécente expression de « ras le bol fiscal », malheureusement utilisée par un ministre décidément peu inspiré, et immédiatement reprise en boucle par la meute médiatique avide de scandale, me désole, et je ne peux pas croire qu’il puisse être partagé par des citoyens responsables.
Par ailleurs, ce gouvernement, décidément peu indulgent pour les croyances de son propre camp, a également pris en compte, notamment sous l’influence de Louis Gallois, grand industriel progressiste, le problème de compétitivité que rencontrait les entreprises françaises confrontées à une concurrence déloyale, et mis en place un allègement – sans précédent – des charges des entreprises, de vingt milliards d’€uros, avec le CICE.
François Hollande a enfin mis à l’ordre du jour des politiques européennes l’objectif de la croissance et de l’emploi, tant il est vrai que l’interpénétration des économies européennes rend totalement illusoire la perspective de se sauver tout seul. La dimension européenne est donc essentielle pour sortir de la crise et affronter dans les meilleures conditions les défis de la mondialisation.
Depuis mai 2012, sous son influence, les choses bougent en Europe, dans l’action de la commission européenne, dans la politique allemande, dans les décisions de la BCE, etc. La nécessité d’une politique en faveur de la croissance, et plus seulement de rigueur budgétaire, y est de plus en plus partagée. La nécessité d’une politique industrielle, la protection contre les concurrences déloyales, le rôle de la politique monétaire en faveur de la croissance, autant de sujets qui ne sont plus tabous et commencent à se traduire en actes.
Oh certes, tout reste à faire mais on est sur le bon chemin.
Toute la difficulté est que pour être entendue et reconnue dans ce rôle d’aiguillon en Europe, la France doit rester crédible aux yeux de ses partenaires et surtout de ceux que cette inflexion vers une politique plus volontariste de croissance irrite ou inquiète.
Et bien entendu, cette ligne moyenne, qui se tient sur la ligne de crête, entre deux gouffres, d’un côté la dérive budgétaire et l’explosion de l’endettement et la ruine, de l’autre la déflation, la récession, la misère et la pauvreté, n’est pas facile à tenir.
Elle est surtout risquée car faiblir sur la rigueur budgétaire affaiblirait la France sur la scène internationale mais trop appuyer sur le frein entrave dans le même temps la reprise de l’économie.
La critique est facile et bien peu, de tous côtés, s’en privent.
Ce président et ce gouvernement ont certes bien des défauts. Je pourrais en écrire des pages.
Mais d’une part, il y a des moments où on doit garder une certaine réserve, je dirais même une discipline certaine. Cela s’appelle la solidarité.
D’autre part, le moment est trop grave pour pleurnicher et contribuer, en s’associant à la meute des adversaires ou au troupeau bêlant des suiveurs, à alimenter le pessimisme ambiant.
Pour se relever, la France a besoin de chacun de nous, elle a besoin de nos efforts, elle a besoin d’optimisme, elle a besoin de confiance.