SOCIALISTE ? SOCIAL-DEMOCRATE ? REPUBLICAIN ? Réflexions sur l'identité du parti socialiste français

Publié le par Xavier GARBAR

SOCIALISTE ? SOCIAL-DEMOCRATE ? REPUBLICAIN ? Réflexions sur l'identité du parti socialiste françaisSOCIALISTE ? SOCIAL-DEMOCRATE ? REPUBLICAIN ? Réflexions sur l'identité du parti socialiste françaisSOCIALISTE ? SOCIAL-DEMOCRATE ? REPUBLICAIN ? Réflexions sur l'identité du parti socialiste français
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Derrière ces étiquettes, revendiquées - souvent avec ardeur -  par les militants et sympathisants de la gauche socialiste ou socialisante, s’affirme une vraie recherche d’identité politique, qui s’appuie cependant parfois sur beaucoup de confusions, volontaires ou non, et d’approximations théoriques et historiques.

Qui suis-je, moi militant socialiste ? Socialiste ? Social-démocrate ? Républicain socialiste ? Social-Républicain ?

Et surtout qu’est et que doit-être aujourd’hui le parti, qui, bon gré mal gré, avec ses périodes fastes et ses traversées du désert, porte depuis plus d’un siècle l’idée et l’espérance du socialisme ?

On raconte que Mitterrand conseillait, avec justesse, à des socialistes tentés dans une période difficile par le renouveau et un changement d’appellation, de ne surtout jamais abandonner l’étiquette de « socialiste », qui serait promptement usurpée par d’autres pour tromper l’électeur et mener une tout autre politique qui disqualifierait le socialisme lui-même. Et de fait, les imposteurs et les intrus ne manquent pas en politique. L’histoire de la gauche parlementaire par exemple regorge de groupes politiques bien à droite déguisés en « gauche démocratique », ou « gauche républicaine » et aujourd’hui, on voit surgir des troupes de la macronie agonisante des « sociaux-démocrates » improbables, nullement gênés de revendiquer cette étiquette après avoir, sans sourciller, voté les lois les plus antisociales de la Vème république.

Socialistes nous sommes, socialistes nous restons donc. Et personne aujourd’hui au PS ne propose de changer de nom.

Pourtant, depuis quelques années, nombre d’entre eux se réclament avec force de la « social-démocratie », afin de souligner une identité particulière.

Une volonté d’abord – et ça peut se comprendre – de marquer son appartenance au vaste ensemble constitué en Europe par les partis socialistes et sociaux-démocrates et son appartenance à un groupe puissant au parlement européen. Notons cependant que ce groupe, dominé, c’est vrai, par la « social-démocratie » allemande, ne s’appelle pas « groupe « social-démocrate », mais « Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates » …

Ensuite, dans le contexte politique français actuel, revendiquer l’étiquette « sociale-démocrate » marque aussi souvent une volonté de marquer sa différence avec la direction actuelle du PS en prônant une autre stratégie d’alliance à gauche, excluant la France insoumise, et préconisant une politique plus encline au dialogue et aux compromis avec des acteurs de la « gauche modérée », du « centre-gauche », etc.

Le prochain congrès du parti socialiste tranchera, j’espère, ce débat, légitime, et récurrent dans son histoire.

Mais si cette aspiration est légitime, est-il pour autant pertinent de se réclamer de la « social-démocratie » quand on est un socialiste français ?

Bien sûr, à l’origine, la social-démocratie est le parti de tous les socialistes en Europe. Même Lénine fut, à cette époque un social-démocrate et cette étiquette n’excluait pas la Révolution prolétarienne de son programme, puissamment irrigué par les concepts marxistes de « lutte des classes » et du « rôle historique de la classe ouvrière ».

Puis, avec le développement et l’installation de plus en plus solide des socialistes dans les parlements européens, et notamment en Allemagne, une autre conception de la « Révolution » apparut, plus progressive, plus « réformiste », incluant la possibilité d’arriver au socialisme par la voie électorale.  

Ainsi peu à peu, la « social-démocratie », tout en proclamant longtemps[1] son attachement à la théorie marxiste, s’identifia à cette voie « réformiste » vers le socialisme, surtout après la scission avec le mouvement communiste issu de la révolution bolchevique en Russie en 1917.

En France, Léon Blum, figure du parti socialiste et héritier de Jaurès, incarna cette conception en relevant, avec une lucidité prodigieuse, les travers du bolchevisme et les conséquences tragiques qu’ils annonçaient, considérant qu’ils étaient incompatibles avec l’identité du socialisme français, qui incluait droits de l’homme et démocratie.

Mais justement, à la suite de Jaurès, il démontrait comment, tout en appartenant au mouvement socialiste européen (la 2ème internationale maintenue)[2], le socialisme français avait une identité particulière et se démarquait des social-démocraties allemandes ou britanniques.

Première différence, contrairement aux social-démocraties européennes, allemandes, britanniques, scandinaves, dont le fondement est le lien puissant, organique, entre le mouvement syndical et le parti, permettant la constitution de partis de masse populaires, le mouvement socialiste français n’a pas pu bénéficier de cet apport. Le mouvement syndical français, longtemps dominé par la mouvance anarchiste (l’anarcho-syndicalisme), due notamment au retard de l’industrialisation en France et à la place importante d’ouvriers qualifiés -plus proche des artisans que des ouvriers à la chaine – en son sein, a très tôt marqué sa distance, sa méfiance voire sa défiance avec les politiques jugés trop « bourgeois ». Quand le socialisme politique se frayait un chemin dans les institutions républicaines, le mouvement syndical prônait la révolution par la « grève générale ». Même si ce radicalisme syndical s’est progressivement émoussé, la distance avec le politique a été « théorisée » et (hélas ?) pérennisée par la fameuse « Charte d’Amiens » qui élevait l’indépendance syndicale au rang de valeur sacrée, qu’aucun syndicat n’a osé remettre en cause par la suite[3].

Cette distinction n’a pas permis au parti socialiste français d’être un parti de masse comme ses homologues européens, et a aussi sans doute limité son implantation dans les classes populaires.

Deuxième particularité, si le parti socialiste français a longtemps conservé son identité « marxiste » (contrairement à ce que disent sottement nombre de commentateurs aujourd’hui, Jaurès fut sans doute le meilleur connaisseur de l’œuvre de Marx, et Blum, notamment au fameux congrès de Tours, a toujours manié avec précision et conviction les concepts de lutte des classes et de révolution socialiste), il a aussi intégré à son ADN, le logiciel « républicain » issu du mouvement des Lumières, du progressisme républicain de la Troisième République, des combats contre l’antisémitisme (affaire Dreyfus,) le cléricalisme et pour la Laïcité et la Séparation des églises et de l’Etat.

On prête avec raison à Jaurès d’avoir incarné cette « synthèse » entre République et Socialisme, entre Démocratie et Droits de l’Homme d’une part, et objectif maintenu de transformation sociale au bénéfice des plus défavorisés d’autre part. Et pour lui, et c’est sa grande réussite, cette « synthèse » devait impérativement se traduire par l’union de toutes les composantes de la gauche politique, de la plus radicale à la plus modérée. Objectif atteint en 1905 avec la création de la SFIO.

Jaurès, Blum, aujourd’hui revendiqués par certains comme des symboles de la modération et du compromis, ont prouvé toute leur vie le contraire, en refusant de délier Socialisme et République, ces deux composantes essentielles. Jamais ils n’ont baissé la garde sur les principes républicains et les valeurs humanistes et l’ont finalement payé dans leur corps, mais jamais non plus ils n’ont abandonné leur soif de justice sociale et de promotion des classes populaires, toute leur œuvre le démontre.

Aujourd’hui encore, seul le parti socialiste incarne cette « synthèse », essentielle et seule capable de permettre un rassemblement des couches sociales qui ont succédé au « "prolétariat" des origines, tout en se transformant et se diversifiant.

S’éloigner des valeurs républicaines, notamment aujourd’hui celle de la laïcité, c’est perdre son âme.

Mais abandonner peu ou prou l’objectif de transformation sociale, afin de lutter contre les inégalités et permettre au monde du travail d’accéder à une vie meilleure, en affadissant notre programme et en y intégrant les concepts du néo-libéralisme, ce serait nier notre histoire et trahir notre idéal.

Au-delà des étiquettes, ne faut-il pas s’attacher d’abord au contenu qu’on met dessous ? 

 Je considère donc aujourd’hui, pour des raisons objectives, historiques, d’une part, et pour rester fidèle à cet idéal de transformation sociale, que l’étiquette « sociale-démocrate » n’est pas pertinente pour identifier le socialisme français.

Pour rester fidèle à son histoire, à ses valeurs, et à son idéal, le socialisme français est plus « Social-Républicain » que « social-démocrate ».

Républicain, donc Socialiste, car selon Jaurès, le socialisme c’est la république poussée jusqu’au bout, la réalisation de la « promesse républicaine" :  « Sans la République, le socialisme est impuissant, sans le socialisme, la République est vide » (Jean Jaurès)

 

[1] Seuls les sociaux-démocrates allemands ont officiellement abandonné cette référence lors de leur congrès de Bad Godesberg en 1959.

[2] [2] Le nom officiel du parti est « section française de l’internationale ouvrière » (SFIO°

[3] Même si la CGT, longtemps dirigée par le parti communiste au vingtième siècle ne l’a respecté qu’en théorie.

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