Deux options, à droite de l’échiquier politique, se présentent aux français :
1) La ligne « libérale » : profiter de la crise pour se débarrasser du modèle social républicain
La première option est proche, sinon directement inspirée, justement, de la politique de Margaret Thatcher. C’est la ligne conservatrice (même si elle use et abuse dans son argumentation, de sa volonté de faire des « réformes » afin de se donner une image moderne de progrès), de plus en plus ultra libérale, des différentes factions rivales de l’UMP et ses alliés. Les discours de Sarkozy, les thèses programmatiques de Fillon, et avec un soupçon de modération, les options d’Alain Juppé, vont tous dans le même sens, et conduisent à démanteler peu ou prou le modèle social français, construit au fil des conquêtes républicaines et sociales du siècle dernier et notamment celles issues du programme du Conseil National de la Résistance en 1945 : réduction drastique des dépenses publiques, affaiblissement voire destruction du statut de la fonction publique, réduction des dépenses de protection sociale, remise en cause généralisée des acquis des salariés en matière de droit du travail, libéralisation à outrance de l’économie.
C’est la voie libérale.
Celle qui considère, en théorie, l’impôt et toute dépense publique comme un prélèvement de ressources qui vont ainsi manquer aux acteurs privés pour développer l’économie, toute dépense sociale comme une charge improductive incitant les agents économiques à la paresse, et toute réglementation du travail ou des échanges comme une entrave au libre (et donc bon) fonctionnement du marché.
Celle dont rêvent tous les réactionnaires de ce pays, jugeant que la crise est une occasion unique de remettre en cause le maximum des concessions au progrès social que les classes dominantes ont du accepter au cours des dernières décennies.
Ce n’est pas – loin s’en faut - celle du gouvernement actuel, n’en déplaise aux esprits chagrins qui voient la vie en noir et blanc (on y reviendra).
Ces thèses, libérales en économie, sont assorties d'un positionnement de plus en plus conservateur, voire réactionnaire en matière sociétale. On a vu, avec les manifestations anti-mariage pour tous, revenir sur le devant de la scène, la France bourgeoise, coincée, étroite d’esprit, haineuse vis-à-vis de toute différence, et surtout hostile à l’égalité des droits entre citoyens.
Par ailleurs, le leadership de Sarkozy a constitué un moment clé de l’histoire de la droite française, en cela qu’il a autorisé, en les décomplexant, les électeurs et militants des partis conservateurs à exprimer tout haut ce qu’on n’osait plus dire depuis 1945 : du coup, sur des sujets sensibles comme l’immigration, la délinquance ou la sécurité, la pratique de l’amalgame, le simplisme et la démagogie, toutes choses jugées électoralement payantes , ont peu à peu rendu poreuse la frontière jusqu’ici plus nette entre droite et extrême droite.
Mauvais et dangereux calcul, car dans cette dérive aventureuse, la droite risque de perdre à la fois son âme …et son électorat qui glisse peu à peu vers l’extrême droite dé diabolisée.
2) L’extrême droite lepéniste : remise en cause des fondements de la République
La seconde politique possible à droite, hélas de plus en plus possible, malgré son irréalisme et sa dangerosité, est prônée par une extrême droite désormais conquérante.
Celle-ci prospère sur fond de misère sociale et culturelle grandissante des couches sociales victimes des conséquences de la crise et d’une mondialisation non régulée par une Europe libérale indifférentes à leur sort. Couches sociales au demeurant trop longtemps méprisées par une gauche « boboïsée » irresponsable et aveugle à la dégradation des conditions de vie des couches populaires.
Ces femmes et ces hommes, aux conditions de vie parfois précaires, ou/et hantés par la peur d’un déclassement social, sont convaincus de l’inutilité de la politique et de la corruption généralisée de la classe politique.
Ce thème du « tous pourris », nourri certes par les échecs en matière d’emploi des partis politiques de gouvernement, mais aussi alimenté par une presse sans scrupule qui met systématiquement en avant les scandales et les dysfonctionnements, est malheureusement renforcé par la violence des prises de positions adoptées de plus en plus souvent par une extrême gauche qui n’a rien appris des années trente (quand elle considérait la social démocratie comme l’ennemi N°1) et qui pratique l’amalgame entre la gauche et la droite (version gauchiste de la formule lepéniste d’« UMPS »)
Se sentant exclus du « système », ou craignant d’en être chassés, ces électeurs succombent aux tentations xénophobes, aux solutions démagogiques et simplistes du « ya qu’a, faut qu’on », et prêtent une oreille attentive aux discours populistes de la nouvelle égérie de l’extrême droite, se disant, bien que modérément convaincus pour la plupart, qu’après avoir essayé sans succès la droite et la gauche, on pouvait tenter sans risque l’aventure de ce côté !
Sortie de l’euro, protectionnisme radical, racisme à peine masqué, mesures discriminatoires envers les immigrés, la politique envisagée mènerait la France au désastre en un rien de temps. La République serait immédiatement menacée dans ses fondements mêmes et le pays s’enfoncerait rapidement dans un profond et honteux déclin.
Un immense effort de reconquête des classes populaires par la gauche s’avère donc indispensable.
Encore faut-il prendre la mesure du danger, devenu réel à partir du moment où l’électorat de droite se reportera indifféremment sur l’UMP « sarkosysé » ou sur le FN « marinisé » et parler haut et clair pour mettre fin à la complaisance générale envers ce mouvement et faire tomber le mythe d’un FN qui se serait « républicanisé ».
Parler haut et clair:
Oui le Front National reste un parti d’extrême droite, prônant l’exclusion des immigrés, la différence des races, la xénophobie et masquant mal l’antisémitisme de son fondateur et de ses séides, encore fort nombreux, derrière une islamophobie plus porteuse aujourd’hui, aux antipodes des valeurs républicaines.
Non le Front National, héritier des collabos de Vichy[1], n’a pas le droit de se réclamer de la République et encore moins de la Patrie[2].
Non le Front National n’est ni populaire ni vertueux. Son leader historique et sa famille sont millionnaires, détenteurs d’une fortune colossale acquise dans des conditions douteuses et ses quelques nouveaux élus ont été déjà nombreux à avoir maille à partir avec la justice.
Non le Front national n’a pas de politique économique alternative et conduirait le pays au désastre. Quelle crédibilité accorder au demeurant à un parti passé en quelques années d’un ultra libéralisme applaudissant Reagan et Thatcher dans les années 80 à une approche sociale défendant aujourd’hui les salariés et leur pouvoir d’achat ?
Non, le FN, qui compte dans ses rangs des intégristes catholiques de la pire espèce ne peut se réclamer de la défense de la laïcité.
Et la liste serait longue encore à énumérer les dangers, les incohérences de cette mouvance politique héritière du fascisme de la pire espèce.
[1]Outre son fondateur, longtemps éditeur de collabos notoires et de chants nazis, le FN a recueilli nombre des derniers pétainistes bientôt suivis par les extrémistes de l’Algérie Française.
[2]Le patriotisme, longtemps méprisé par une certaine gauche libérale-libertaire, est heureusement réapparu dans le discours et le corps de doctrine de la gauche de gouvernement. Comme l’a longtemps revendiqué un Chevènement bien isolé durant des années, le patriotisme est en France né à gauche et reste une valeur de gauche.