EUROPEENNES :POURQUOI VOTER LE 25 MAI? ET POUR QUI ?

Publié le par Xavier GARBAR

EUROPEENNES :POURQUOI VOTER LE 25 MAI? ET POUR QUI ?

Dimanche prochain, j’irai voter pour élire des députés européens, et je voterai pour la liste socialiste. Pas vraiment un scoop, me direz-vous ! Et pourtant, ça n’allait pas de soi.

Je rappelle à ceux qui ne me connaissent pas ou qui ont oublié, que j’ai voté Non à Maastricht en 1992, et encore Non au traité constitutionnel en 2005. Et je ne le regrette pas, restant persuadé que c’était à chaque fois le bon choix :

Le traité de Maastricht (dont j’ai la malice de rappeler qu’un certain …Mélenchon nous en promettait monts et merveilles en matière de créations d’emplois…) a créé une monnaie unique dans un continent composé de nations aux structures et niveaux de développement économique tellement divers qu’il portait en germe la plupart des maux qui accablent aujourd’hui l’Europe. En créant une monnaie constamment surévaluée, le choix a été fait alors de privilégier la rente, de donner la priorité à l’austérité contre la croissance et l’emploi.

En 2005, les gouvernements conservateurs, avec la complicité naïve des sociales démocraties (« on accepte la rigueur financière et après comme on a été gentil, ils nous concéderont des avancées sociales »…) ont voulu graver dans le marbre le fonctionnement ultra libéral de la construction européenne. Les talibans libéraux de la commission européenne obéissent certes à la majorité conservatrice des gouvernements européens qui a généré une commission à son image, mais aussi, il faut le rappeler, aux textes des traités (la concurrence libre et non faussée, l’indépendance de la BCE, etc.).

Tout cela est vrai. Tout cela reste vrai. Mais, car, pour moi, il y a un « mais », il faut savoir tourner la page et prendre en compte la réalité. La monnaie unique était peut-être une sottise, mais aujourd’hui, revenir en arrière est une vaste débilité, au mieux impossible, au pire catastrophique.

Les traités ne sont pas bons, ils sont marqués par la méfiance à l’égard des peuples, par une inspiration, une imprégnation libérale. Mais ils existent, ils ont été acceptés, plus ou moins démocratiquement certes, mais en tout cas, légalement, par les nations européennes.

Si l’on veut agir, avoir une prise sur l’évènement, rien ne sert de se lamenter et de ressasser les erreurs du passé. Les historiens s’en chargeront.

Pour l’heure, il faut tenir compte du rapport de force, de l’évolution des positions des uns et des autres, des marges de manœuvres disponibles.

Les lignes ont bougé depuis 2005.

Justement, les lignes ont bougé depuis 2005. La social-démocratie européenne a pris conscience de la nécessité de réorienter les politiques européennes en faveur de la croissance et de l’emploi. Le PSE s’est clairement prononcé pour une politique d’investissements publics, pour une harmonisation des politiques fiscales et sociales, pour une certaine protection permettant un « juste échange », contre la poursuite des politiques d’austérité, pour une plus juste évaluation de l’euro, soit exactement ce que proposait le candidat Hollande en 2012. Il ajoutait d’ailleurs que cette politique devrait, pour être possible et effective, être relayée au niveau européen.

Vous me direz que ça nous « fait une belle jambe » puisque le parlement européen n’a aucun pouvoir sur la commission européenne, nommée par les gouvernements, et que justement les efforts du président français pour réorienter l’Europe dans le sens de la croissance, sont restés sans suite.

C’est là que des marges de manœuvre nouvelles sont apparues :

Le Parlement dispose maintenant d’un pouvoir d’influence nouveau : il sera très difficile aux gouvernements, en vertu de l’interprétation qui prévaut de plus en plus des traités, de ne pas tenir compte des résultats des élections au parlement européen pour désigner le président de la commission.

En clair, cette élection, pour la première fois, présente un enjeu politique déterminant : si les partis socialistes et sociaux démocrates obtiennent la première place – et c’est possible – le prochain président de la commission sera Martin Schulz, socialiste allemand.

Oh, ce n’est pas un gauchiste, pas même un socialiste virulent, mais ce paisible social démocrate défendra à la commission, non plus une politique austéritaire et ultra libérale, mais une politique en faveur de la croissance, de l’investissement, de l’emploi. En cela il pourra être un appui sans précédent pour les gouvernements européens, la France en premier lieu, qui restaient jusque-là, isolés dans leur souhait d’une autre politique.

Même si cela ne va pas aussi loin que nous le souhaiterions, même si nous devons accepter des compromis, même si le respect des disciplines budgétaires reste d’actualité[1], cela constituerait probablement le plus grand changement politique de ces dernières années. C’est dire qu’aucune voix ne devrait manquer pour permettre cette ouverture.

Dans ces conditions, appeler au boycott de ces élections européennes, comme le font certains de mes anciens camarades, peut-être tout simplement parce qu’ils n’ont pas la possibilité de présenter des listes dans tout le territoire, me paraît déraisonnable quand le plus grand risque réside dans l’abstention.

Celle-ci risque d’être massive, parce que l’enjeu de l’élection[2] n’est pas perçu par les citoyens, nullement informés par des médias qui se délectent à l’avance du « drame », tellement « vendeur », que pourrait constituer une première place ainsi offerte à l’extrême droite.

Aussi faut-il répéter inlassablement aux amis, aux collègues, aux voisins, de ne pas s’abstenir, et si possible de voter pour une liste qui a le pouvoir d’agir. Il n’y aura qu’un seul tour, le mal ne pourra pas être réparé le dimanche suivant !

[1] Mais comment raisonner comme en 2002, alors que la dette a doublé depuis cette date ?

[2] La multiplication des listes, absurde voire ridicule, montre que peu de politiques n’ont compris que cette élection était la première du genre à avoir un enjeu et que son résultat influerait sur la vie de chacun.

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